Ce que j’aime le plus dans un jeu vidéo ? Ses secrets !
Un jeu vidéo sans passages secrets, c’est un peu comme un chevalier Jedi sans sabre laser… Il reste cool, mais il pourrait l’être beaucoup plus !
Je me souviens comme si c’était hier des premiers secrets que nous avons pu trouver, moi et mes frères et soeurs, dans nos jeux vidéo favoris !
Dans le shoot’em up Nemesis 2 (1987) sur MSX, après avoir battu l’un des vaisseaux spatiaux qui faisaient office de boss, on pouvait rentrer à l’intérieur de sa carcasse pour se retrouver propulsé dans un niveau secret.
Dans Penguin Adventure (1986), l’un des premiers jeux de Hideo Kojima, en tombant dans certaines crevasses avec son pingouin, on pouvait “rentrer dedans” pour être téléporté plus loin dans le jeu !
Toujours chez Konami1, le Metroidvania avant l’heure The Maze of Galious (1987) a clairement été le titre déclencheur d’un “toc” commun à beaucoup de joueuses et de joueurs… Vous voyez ce dont je veux parler ?!
The Maze of Galious a en effet été mon premier contact avec un jeu où chaque mur était à quelques coups d’épée de révéler un bonus caché !
Combien sommes-nous à avoir déjà sondé TOUS les murs d’un jeu à coup d’épée, ou de fouet (Castlevania et ses gros poulets énergisants !), pour tenter de découvrir un passage secret ou un bonus caché ?
Le secret fait partie intégrante de l’ADN du jeu vidéo.
Et il peut prendre un nombre incroyable de forme : passage, bonus, cache, code2, arme, personnage, fin… et j’en passe !
C’est lui qui nous cueille par surprise au détour d’un couloir ou d’un niveau pour définitivement nous rendre accrocs ! Tout autant que son histoire, sa boucle de gameplay ou le challenge qu’il peut offrir, la présence de secrets est ce qui nous pousse à avancer dans un jeu.
La découverte d’un secret dans un jeu vidéo, bien plus qu’une surprise ou une récompense, est l’affirmation qu’il existe un monde derrière le miroir.
C’est la preuve concrète que le jeu dérobe à notre regard des trésors qui ne demandent que notre sens de l’observation ou de la déduction pour être découverts.
Tomber sur un secret, c’est un peu comme percer la matrice ou trouver les lunettes du film Invasion Los Angeles3 !
Le secret possède aussi son propre langage, qu’il nous faudra apprendre à lire.
Que ce soit les craquelures sur la paroi d’un mur de The Legend of Zelda : A Link to The Past, suggérant la présence d’un passage qui ne demande que l’explosion d’une bombe pour être révélée ; ou la couleur du point marquant les niveaux sur la carte de Super Mario World, indiquant la présence d’une sortie secrète… Ces détails visuels forment un vocabulaire avec lequel les développeurs initient un dialogue “à demi-mots” avec nous.
Il n’est donc pas surprenant que ces secrets prennent parfois la forme d’easter eggs, c’est à dire de clins d’oeil adressés aux joueurs. Ils font souvent référence à d’autres jeux de la même série ou d’autres titres de l’éditeur, voire à d’autres jeux indé dans le cadre d’une production indie.
Le tout récent et superbe Animal Well, dont nous allons beaucoup parler dans cet article, rend ainsi hommage à Tunic et FEZ !
Autre exemple : l’une des maisons du village Cocorico dans The Legend of Zelda : A Link to the Past contient un portrait de… Mario bien sûr ! Et si on tente de le manipuler, le joueur est récompensé par une pluie de rubis !
Car le secret est aussi une façon de saluer le joueur pour sa curiosité et sa volonté d’expérimenter avec les éléments qui constituent le monde du jeu, ou ses règles.
Parfois il s’agit simplement de la sensation que quelque chose cloche… ou n’est pas à sa place. Et là, c’est notre “instinct de gamer ou de gameuse” qui est mis en jeu !
Un jeu comme Animal Well repose énormément sur ces “réflexes” ou cette grille de lecture unique que l’on acquiert naturellement à force de jouer. Car les game designers jouent comme nous, et peuvent donc anticiper nos réactions face à ces indices suggérant la présence d’un secret, pour mieux jouer avec.
Billy Basso, le développeur solo de Animal Well, a ainsi truffé son jeu de ces “singularités visuelles”, comme un parent s’amuserait à planquer des oeufs de pâque dans un jardin pour que ses enfants les trouvent !
Résultat : le puits rempli d’animaux étranges que l’on explore dans Animal Well, semble avoir été créé tout entier pour titiller notre regard et fonctionne sur le principe du conditionnement pavlovien !
Juste avant Animal Well, j’avais joué à Tunic, auquel j’ai d’ailleurs consacré un article. Et à première vue, ces deux titres n’ont rien en commun…
Le premier est un jeu de plates-formes / puzzle, qui nous glisse dans la peau translucide d’un minuscule blob dans des décors 2D pixel art. Le second est un hommage à The Legend of Zelda, où l’on incarne un petit renard en cosplay de Link dans des environnements en 3D isométrique.
Ces jeux, à priori si différents, ont pourtant un point commun majeur : ils affichent tous les deux une passion dévorante pour les secrets !
Si Tunic comme Animal Well se terminent assez vite (comptez 14 et 7h environ), ils cachent une énorme partie de leur contenu derrière de multiples couches d’énigmes.
Ce sont donc des jeux qui comptent énormément sur la ténacité et la perspicacité de leur communauté de joueurs et de joueuses.
Car le secret est aussi un formidable outil de communication et de socialisation.
Une fois un secret découvert, je pense que nous avons toutes et tous la même envie… celle de le partager aussi vite que possible !
D’autres jeux, comme FEZ, The Witness, Hyper Light Drifter ou encore Outer Wilds par exemple, sont connus et appréciés pour les secrets dont ils regorgent. Et c’est à ces secrets que ces titres doivent en grande partie, je pense, leur statut culte et leur incroyable longévité.
Prenez FEZ… Il est sorti en 2012 et 12 plus tard je ne peux pas m’empêcher d’en parler ultra régulièrement !
La plupart des jeux à monde ouvert, comme Elden Ring bien sûr (dont de grosses parties de la carte sont camouflées), mais aussi Red Dead Redemption 2 et bien entendu The Legend of Zelda : Breath of the Wild et sa suite, emploient aussi le “langage du secret” pour capturer notre attention et dévorer notre temps !
Comment oublier ces moments magiques dans Elden Ring, où l’on découvre, par exemple, un équipement rarissime comme le scarabée d’argent (un talisman augmentant nos chances de tomber sur des objets précieux !), après avoir sauté dans le vide pour atterrir sur un pont invisible, avant d’avancer dans une impasse et découvrir un coffre aux trésors derrière un mur qui n’était qu’une illusion !
Nous avons toutes et tous des histoires comme celle-ci à partager après avoir passé plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines d’heures dans un jeu à monde ouvert !
Ces moments créent une véritable conversation asynchrone avec les développeurs. Et c’est en découvrant les secrets d’un jeu que l’on finit par vraiment le connaître, lui et ses créateurs…
Un peu plus haut j’ai mentionné le genre Metroidvania, qui lui aussi s’appuie énormément sur notre curiosité ainsi que notre appétit pour l’exploration et la quête d’indices environnementaux. Cette plate-forme un peu trop haute, qui deviendra accessible plus tard, une fois le double saut débloqué… Ou ces ronces qui nous obstruent le chemin, et dont on pourra se débarrasser une fois un certain pouvoir obtenu !
Tous ces détails nous poussent parfois à sortir un carnet de notes pour griffonner fiévreusement schémas et croquis, voire carrément pour dessiner sa propre carte afin de bien marquer les endroits où l’on suspecte la présence d’un secret !
Je me rappelle ainsi de l’immense fierté ressentie en découvrant dans le magazine Micros MSX une carte complète du jeu The Maze of Galious, en tout point identique à celle que j’avais moi-même dessiné !
Les magazines ont d’ailleurs été pendant longtemps le relais de cette culture du secret dans le jeu vidéo, en accueillant dans leurs pages des “soluces” et autres astuces.
Mais aujourd’hui, jeux et consoles nous octroient des outils dédiés pour nous accompagner dans notre quête de secrets.
A commencer par la possibilité de réaliser des captures d’écran, voire de les partager directement sur les réseaux sociaux, ou tout simplement d’annoter la carte in game du monde traversé à l’aide des icônes fournis !
Les écosystèmes sociaux ont eux-mêmes bien évolué. Notre groupe d’ami(e)s peut désormais prendre la forme d’une énorme communauté sur Discord, Reddit ou d’autres réseaux, où tout le monde partage ses découvertes. L’époque pré-Internet (80s/début 90s) où la découverte d’un secret ne s’accompagnait d’aucune preuve, sinon la bonne foi du joueur qui la partageait, est bien révolue !
En s’échappant ainsi du territoire du jeu, pour investir d’autres espaces, qu’ils soient IRL ou toujours numériques, les secrets nous unissent dans une même quête de vérité et d’aventures.
Et l’enfant qui sommeille en nous s’agite forcément lors de la découverte d’un secret !
Car après tout, dans nos vies d’adulte, la quête de secrets dans un jeu vidéo est sans doute ce qui se rapproche le plus de nos chasses aux trésors enfantines !
Et pour terminer cet article, dédié à un sujet dont il est impossible de faire le tour, quoi de mieux que la vidéo de l’un des passages secrets les plus mythiques de l’histoire du jeu vidéo : la découverte de la possibilité de marcher au dessus du niveau 2 de Super Mario Bros. (1985) sur NES ! Un chemin secret qui mène aux fameuses Warp Zones faisant office de téléporteurs et donc de raccourcis !
N’hésitez pas à partager dans les commentaires vos secrets favoris ou vos “jeux à secrets” préférés !
PS : Toutes les images de cet article ont été capturées par mes soins à partir de versions commerciales de Animal Well (PS5) ; DOOM (Switch) ; FEZ (Switch) ; Tunic (Switch) et Hyper Light Drifter (PS5). L’image de Prince of Persia : The Lost Crown a été capturée à partir d’une version PS5, fournie par Ubisoft. Enfin, la capture d’écran de The Maze of Galious provient du site CDromance. Les images et vidéos des jeux Super Mario World, The Legend of Zelda : A Link to the Past et Super Mario Bros. ont été prises à partir des chaînes SNES et NES accessibles aux abonnés Switch Online.
Je pense que mon amour des secrets dans le JV doit beaucoup au travail de l’éditeur japonais Konami sur MSX !
Oui, on va citer le fameux Konami Code ! En réalisant un enchaînement dans un ordre précis de directions et de pressions de boutons à la manette (haut, haut, bas, bas, gauche, droite, gauche, droite, B, A), il était parfois possible d’obtenir des vies supplémentaires dans les jeux Konami ! Ces manipulations “à la manette” ont inspiré bien d’autres studios, dont de nombreux indé aujourd’hui :)
Invasion Los Angeles, également connu sous le nom They Live, est un classique du film fantastique réalisé par John Carpenter. En mettant sur son nez une certaine paire de lunettes, le héros découvrait qu’une partie des humains autour de lui étaient des extraterrestres, ainsi que la propagande subliminale destinée à nous asservir qui se dissimulait derrière chaque affiche publicitaire.
Donc quand tu commences un jeu, au lieu d’aller tout droit, tu rebrousses chemin direct ? 😀
J’ai tjs ce réflexe ! 😀
Ah la la... Ça me fait tellement plaisir chaque fois que tu parles du MSX !!
Je me souviens de Nemesis et de ses niveaux secrets cachés dans chaque niveau du jeu (entre deux moaï par exemple) ou bien de la bonne petite crevasse à trouver dans Penguin adventure pour tomber sur le magasin du père noël 😊
Merci pour tous ces bons souvenirs qui remontent !!